A l'image de la station, cette expérience a été énorme de part ce que j'y ai fais, appris et de part les gens que j'y ai rencontré...
Après avoir quitté la pension pour chevaux, j'ai donc poursuivi ma “western adventure” dans une station de l'outback. Les stations sont ces énormes fermes d'élevage. J'ai travaillé dans cette station en tant qu'helper, c'est à dire que j'étais nourri et logé mais pas rémunéré, ce qui me convenait parfaitement car c'est vraiment une expérience que je voulais vivre en Australie et l'ambiance n'en est que plus conviviale. Au final j'ai quand même été payé, parce que même si Jorgen a un vrai accent de fermier du bush pas facile à comprendre, c'est vraiment un mec cool et il tennait à me récompenser pour le coup de main. En même temps c'est vrai que ça n'a pas été de la tarte comme on dit.
Bref, reprenons... Il y a bientôt trois semaines j'ai quitté Perth en bus de nuit, l'unique bus hebdomadaire déservant Mount Magnet, ma destination, à 550 kilomètres au Nord-Est de la capitale du Western Australia. Jorgen m'attendait à la station d'essence (et de bus) à 4h30 du matin et nous sommes directement parti chercher 800 litres de fuel à 300 kilomètres de là, à l'aérodrome le plus proche, pour approvisionner le petit avion qu'il utilise pour bosser. Puis nous sommes rentré à la fameuse station qui s'étend sur 100 000 hectares (j'ai fais les conversions dans toutes les unités possibles, ça reste vraiment énorme) et où se promènent pas moins de 3000 moutons Moreno et quasiement autant de chèvres Billy. Et me voilà retombé dans une ferme du bush!
Comme dans toutes les fermes, on y fait beaucoup de mécanique. Une de mes premières tâches a été d'aider à réparer les motos-cross qui remplacent les chevaux pour rabattre le bétail. Ca enlève un peu de charme au métier mais c'est quand même beaucoup plus pratique surtout pour un mécanicien de formation comme Jorgen. Sinon je n'ai jamais changé et réparé autant de roue de toute ma vie, les vieux pneux et le bush épineux ne font pas bon ménage, ça éclate comme les ballons à la fête foraine.
J'ai également participé à la construction et la réparation de plusieurs kilomètres de clôtures, dont l'alignement des piquets est très important et vérifié grâce au fusil à lunette servant normalement à tirer les dingos.
Pour la partie plus “cowboy”, nous avons passé quatre jours à changer tous les moutons d'enclos qui ont une superficie moyenne de 80 km². Réveil avec le coq et le soleil à 4h30 pour être au rendez-vous avec l'avion à 5h du mat. Après une petite heure de cartographie et de stratégie, la traque peut commencer.
Trois motos-cross, un ute 4x4 et un avion, ça devrait être facile avec tout ça me direz-vous... Et bien certaines fois le rabattage a duré jusqu'à 8 heures les jours où le climat n'était pas en notre faveur. Le vent joue beaucoup car les moutons remontent naturellement face au vent et les fortes chaleures qui atteignent souvent plus de 40° fatiguent le bétail qui ralentit et s'arrête à l'ombre de chaque arbre ou buisson.
Lors de ces journées j'ai souvent conduis le ute. Il sert de marqueur à l'avion, de transport pour la moto de secours et de récupération des jeunes, des bléssés ou des malades qui n'arrivent pas à suivre le rythme. On force ces pauvres bêtes à parcourir plusieurs dizaines de kilomètres entassé les uns contre les autres en plein cagnar, certains ne survivent pas jusqu'à l'arrivée.
J'ai aussi quelque fois conduit la moto-cross mais ca demande plus de technique. Il faut d'abord regrouper les moutons éparpillés dans le bush aux quatre coins de l'enclos. L'avion nous guide par talkie-walkie pour trouver les bêtes puis en slalomant entre les arbres il faut les rabattre vers le troupeaux. Une fois au complet, il faut continuellement encercler le troupeaux en le poussant vers le portail et se lancer à la poursuite des plus téméraires qui tentent de s'échaper.
Ensuite on met en place les pièges à moutons autour des abreuvoirs alimentés par les éoliennes des années 40. Puis quelques jours plus tard on revient pour charger les moutons dans le camion et les emmener retrouver leurs collègues.
On utilise également les pièges pour capturer les chèvres qui sont trop agiles et n'ont pas assez l'esprit grégaire pour être déplacées en grand nombre avec les motos. Et là c'est du sport! Un mélange d'Interville et de corrida, les Billies sauvages c'est parfois 60kg de muscle, des cornes de plus de 40cm et un caractère très bagarreur. Il vaut mieux toujours surveiller ses arrières et bien garder le tazer à la main. Mais ca nous a quand même valu des moments bien marrants, comme le rodéo sur chèvre ou encore de la lutte au sol, deux hommes versus une big fat Billy. “Fucking stupid animal” comme dirait Jorgen.
La partie la moins drôle de ce boulot est de traiter ou d'achever les moutons infecté par les mouches qui pondent dans leur laine. C'est vraiment pas joli à voir et l'odeur des cadavres qui pourrissent au soleil est vraiment écoeurante. Je pense que l'expérience à l'abattoire m'a pas mal aidé sur ce coup là. D'ailleurs, pour une coïncidence, il y a encore quelque temps Jorgen était en contrat avec l'abattoire T&R de Murray Bridge où j'ai bossé. Là je vois le tout début de la chaine et je comprend mieux où est-ce qu'ils trouvaient toutes ces bêtes à abattre quotidiennement.
Pour retourner à quelque chose d'un peu plus gaie, une autre partie du boulot consiste à libérer les animaux squatters tels que les kangourous ou les émus qui viennent boire dans les pièges et qui se bloquent dans les grillages. "Vas t'en loin, cours, cours petit naïf".
J'aurais voulu rester un peu plus longtemps pour participier à la tonte des moutons dans deux semaines, mais je pense que j'en ai vu assez (j'ai l'impression d'avoir le syndrome des deux-semaines-max-au-même-endroit). Et la fin de mon visa approchant, je veux avoir assez de temps pour trouver un lift et visiter la côte. Parce que c'est sympa les chevaux, les moutons et les chèvres mais le Western Australia possède de magnifiques plages et spots de plongée, ça serait dommage de rater ça.
quelle expérience!!! quel courage!!! mon Mika. Prends bien soin de toi comme tu sais si bien le faire me dirais-tu, plein de bisous les 2 M
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